Pourquoi les hommes se fatiguent-ils ?
978-2-36630-080-2
Neuf
Marco Saraceno
Une histoire des sciences sociales (1890-1920)
Pourquoi les hommes se fatiguent-ils ? La réponse à cette question peut se faire selon une logique « explicative », en cherchant les « causes » objectives de la baisse de l’activité dans le temps, et d’après une démarche « compréhensive », en définissant les « raisons » qui conduisent l’homme à se dépenser.
Pourquoi les hommes se fatiguent-ils ? La réponse à cette question peut se faire selon une logique « explicative », en cherchant les « causes » objectives de la baisse de l’activité dans le temps, et d’après une démarche « compréhensive », en définissant les « raisons » qui conduisent l’homme à se dépenser.
La tension entre ces deux niveaux de réflexion est le fil rouge de cet ouvrage qui suit leur dialectique dans la tentative de fonder une « science du travail humain » à cheval entre le XIXe et le XXe siècle siècle. Répondre à la question : « pourquoi les hommes se fatiguent-ils ? » signifie à la fois définir les conditions optimales de travail et réfléchir à la spécificité anthropologique de l’activité productive qui semble échapper à la loi du « moindre effort ». En effet, selon les mots du physiologiste italien Angelo Mosso, dont les recherches sont le point de départ de cet ouvrage, si l’homme se fatigue c’est parce qu’il « n’est pas comme un locomoteur qui consomme un kilogramme de charbon pour chaque kilomètre parcouru ». Cela signifie, d’une part, qu’il existe un mécanisme physico-chimique spécifique aux « moteurs animés » qui fait augmenter la dépense d’énergie dans le temps et donc baisser le rendement, mais aussi, d’autre part, qu’à différence de la machine, l’homme régule « volontairement » son effort en fonction de la valeur qu’il attribue à son activité.
Cet ouvrage suit l’histoire des mesures mécaniques, énergétiques et psychophysiologiques du fonctionnement organique, par lesquelles la science a expliqué le phénomène de la fatigue. Il montre que ces techniques métrologiques n’arrivent jamais à saisir leur objet puisque la force de la contraction musculaire ou la vitesse de l’influx nerveux ne sont du « travail » que si l’on prend en compte le but pour lequel elles ont été appliquées. Toutefois cela ne signifie pas que ces mesures seraient « fausses », au contraire, elles contribuent au débat de valeurs par lequel l’homme individuellement et collectivement oriente son activité. En s’inspirant de la lecture que Max Weber a faite de la science du travail, l’histoire retracée dans cet ouvrage est une invitation épistémologique à éviter l’opposition entre explication et compréhension, homme-machine et homme-acteur, rationalité instrumentale et rationalité axiologique.
Docteur en Sociologie et Histoire des Sciences, Marco Saraceno est chercheur post-doctorant au Centre d’études des techniques, des connaissances et des pratiques de l’Université Paris 1 Panthéon--Sorbonne. Ses recherches portent sur l’histoire et l’épistémologie des sciences humaines et sociales et notamment sur les fondements socio-anthropologiques des pratiques de modélisation de l’activité corporelle.
Illustration de couverture : Estasi di san Girolamo (Exstase de saint Jérôme) de Manetti Rutilio (1628).
Préface de François Vatin
Introduction
Ergographie – Mesurer le rendementénergétique
Les sources de l’ergographe : bioénergétisme et cinématique
Le travail physiologique d’Auguste Chauveau
La méthode graphique d’Étienne-Jules Marey
L’ergographe
La question du stimulus
La solution d’Angelo Mosso – Un instrument pour mesurer le travail volontaire
Suite et crise de l’ergographie
Charles Henry et Józefa Ioteyko : de la courbe à l’équation
La crise de l’ergographe : retour à l’expérience quotidienne de l’économie
L’ambivalent héritage ergographique – Évaluer l’effort volontaire
De l’ergographie à la psychotechnique – De la mesure du rendement au classement de supériorité
Alfred Binet, Édouard Toulouse et les origines de la psychologie différentielle
La psychotechnique de Jean-Maurice Lahy : la circularité de l’évaluation
De l’ergographie à l’énergétisme social – De la mesure du rendement à la comptabilité de l’utilité
Ernest Solvay : comptabiliser l’utilité sociale
Émile Waxweiler : l’origine sociale de l’utilité sociale
De l’ergographie à la démocratie industrielle – De la mesure du rendement à l’arbitrage des évaluations
Armand Imbert, l’économie organique et l’arbitrage social
Zaccaria Treves et Armand Imbert et la question de l’évaluation de l’indemnisation des accidents
De l’ergographie à l’ergomachie –
De la mesure du rendement à la valorisation de l’effort collectif
L’ambivalence de la fatigue dans la suite de l’œuvre d’Angelo Mosso
L’ergomachie d’Angelo Mosso à Robert Michels, une psychophysiologie de la volonté collective
Max Weber et « l’esprit » de l’ergographe – Comprendre l’économie de soi
La volonté des peuples et la volonté du cordonnier
Aux sources de la sociologie compréhensive : le refus de l’alternative volonté-déterminisme
Le débat avec Alfred Weber entre darwinisme social et sélection professionnelle
L’action volontaire, entre stimulus psychophysique et calcul économique
L’auto discipline du travail industriel
Conclusion
Bibliographie
Index des noms
Auteur | Marco Saraceno – Préface de François Vatin |
Hauteur | 24 cm |
Largeur | 17 cm |
Épaisseur | 10 mm |
Poids (g) | 340 |
Année | 2018 |
Nombre de pages | 176 p. |